jeudi 18 avril 2013

Actualités de l'UFR


ACTUALITÉS DE L'UFR


Dans cette rubrique seront publiées les actualités du département de Lettres.

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dimanche 14 avril 2013

Critiques et découvertes


CRITIQUE ET DÉCOUVERTE
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Invention écrite



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Atelier de traduction : proposer vos traductions de textes classiques, modernes, de toutes langues et de tous horizons.

samedi 13 avril 2013

Mallarmé critique l'art, avec Jean-Nicolas Illouz



MALLARMÉ
CRITIQUE
L'ART



SAINTE
Un Au-delà de la langue.
« C’est sur des pattes de colombes qu’arrivent les grandes révolutions » (Nietzsche)






Sainte est un condensé de finesse et de réflexion mallarméenne. Écrit dans l’horizon du Parnasse, portrait de la patronne des musiciens « Sainte Cécile », le poème passe de la recherche formelle du Parnasse à un manifeste pour une poésie musicale, mystique voire ésotérique. Sainte accompagne la transition de Mallarmé et son passage vers un au-delà poétique où Dieu n'est plus qu'une fiction de l'homme.
Le poème englobe plusieurs questions d'importance pour Mallarmé, mais aussi pour la littérature toute entière et la linguistique. Il permet de comprendre et d'illustrer le glissement de Mallarmé du Parnasse au Symbolisme, et, hors de ces écoles, de discerner la crise métaphysique de l'auteur, le creux d'un verbe et d'un mot angoissant qui laisse progressivement apparaître le néant qui résonne dans la langue.
Le style parnassien très descriptif est en réalité mis à mal par une poétique de la suggestion, une folie du poème qu'à l'époque il est très difficile de prendre au sérieux. Si Mallarmé place Sainte au centre de son ouvrage Poésie après avoir quitté le Parnasse, ce n'est pas par hasard : le poème annonce un tournant décisif.
La disposition du poème, les deux huitains disposés en miroir, la ponctuation détournée au profit d'une signification différente, le déséquilibre des vers, l'absence de mélodie, et dans le fond, le passage d'une Sainte de la Musique à une Sainte de la poésie, donc pour Mallarmé, une Sainte du Silence, tous ces éléments mettent en exergue la route que Mallarmé prend en creusant le vers dans un tour de force nihiliste : vers le néant, le silence, le vide de signifiant, où les âges modernes remplacent les âges théologiques. Aucune transcendance ne garantie la vie, la beauté, la poésie, le papier est un lieu vierge où le sens n'est garanti par aucune instance suprême.

Je dis une fleur! et, hors de l’oubli où ma voix relègue aucun contour en tant que quelque chose d’autre que les calices sus musicalement se lève, idée même et suave, l’absente de tout bouquet.



Le poème Sainte, écrit en 1865, a une existence mobile et coule de différentes façons pendant près de 30 ans. Ecrit dans l’horizon du Parnasse, portrait de la patronne des musiciens « Sainte Cécile » glisse lentement, note de musique sainte, de l’aile du chérubin qui la protège à une autre réalité, faisant d’elle un personnage de papier insaisissable sous la plume du poète, tout comme glisse le poème de la recherche formelle du Parnasse à un manifeste pour une poésie musicale, mystique voire ésotérique. Ce poème retrace, par la perte des instruments de musique liturgique et des livres sacrés des définitions précises marquées par le verbe, au profit de l’incertitude de la poésie. Perte aussi d’une foi figée vers une croyance dans les possibilités infinies du langage. Comme un passage des âges théologiques aux âges modernes de la littérature, que marquera très fortement Mallarmé, dépassant son époque et reconnu bien tard : « Il travaille à un livre dont la profondeur étonnera, non moins que sa splendeur éblouira tous sauf les seuls aveugles mais quand donc enfin, cher ami ? » (Verlaine, Poètes Maudits).

Sainte, repris par Ravel en 1896, ironise en poussant les notes dans leur retranchement, mettant en valeur le fait que le langage utilisé par Mallarmé est de la musique par excellence, non pas une trop grande musique, mais un son proche de la nature, qui pense au-delà de l’essence et de l’apparence, au-delà du sens que l’on fait des mots et invente, mot après mot, son propre langage, un langage-chant dont le génie est d’inventer ses propres symboles mouvants.

    1. L'après-midi d'un faune
« Je rime un intermède héroïque dont le héros est un faune, ce poème renferme une très belle et haute idée, mais les vers sont terriblement difficiles à faire, car je le fais absolument scénique, non possible au théâtre, mais exigeant le théâtre. »

Lettre à Cazalis, 1865

Le poème est un intermède, mot intéressant chez Mallarmé dans le sens où il évoque une idée qui lui est chère : celle du temps suspendu, donc d'un moment où rien n'est réel ou ancré dans une réalité physique, en littérature le moment de la page blanche, ou de l'espace blanc entre deux paragraphes, celui qui permet au texte de prendre corps. L'intermède est aussi l'instant où le doute peut apparaître, le doute du Faune, créature chimérique du poète, homme, bouc, dieu, et illusion d'illusion : le Faune se trouble lui-même en confondant rêve et réalité, tandis qu'il ne prend chair que dans les caractères noirs sur blanc que forment les mots qu'une imagination a fait cohabiter les uns avec les autres. Le doute est donc d'abord celui de Mallarmé : « Aimai-je un rêve ? » (vers 4) Les nymphes que le Faune ne sait s'il les a amoureusement étreintes, qu'il garde en souvenir, en rêve, en instrument « Que je coupais ici les creux roseaux domptés » (vers 26), sur sa chair « mon sein, vierge de preuve, atteste une morsure » (vers 40) sont peut-être pour Mallarmé l'idée de l'inspiration qui fait exister l'art. Mais le doute est là : les muses, l'art, la flûte, l'instrument, le jus du raisin, l'émotion procurée, existent-ils ? C'est, comme le dit lui même Mallarmé à Casalis « une très belle et haute idée », d'essayer de mettre en scène, en musique, en images mouvantes comme celle d'un rêve et d'un poème, l'évanescence de la jouissance, amoureuse ou littéraire.
Le récit du Faune se déconstruit au fur et à mesure qu'il se déroule, quand une image naît, une autre s'oppose ou une négation, une addition, une autre proposition intervient et retourne l'idée « Ce vol de cygnes, non!de naïades se sauve/ ou plonge... » (vers 32) malgré cela c'est vers l'ajout qu'amène le poème, comme une surimpression, les sens visuels peuvent accompagner la lecture comme un film où les images s'ajoutent en transparence les unes sur les autres. La typographie, l'agencement des mots, les signifiés détournés, tendent à démontrer cela. Dans le vers cité précédemment, le vol de cygnes peut aussi être celui des signes graphiques qui se déplacent d'une manière particulière sur la page « blancheur animale au repos » (vers 29), caractères qui trop durement mettent à jour les rouages du théâtre monté par le Faune, que celui-ci rectifie aussi net en remplaçant Cygnes par Naïades.
« Moi, de ma rumeur fier, je vais parler longtemps des déesses» (vers 34) N'est pas fabulateur et rêveur de génie qui le souhaite. Le Faune prend plus de plaisir encore dans l'énonciation de son intermède érotique « Quand des raisins j'ai sucé la clarté,/ (…) Rieur, j'élève au ciel la grappe vide/ Et, soufflant dans ses peaux lumineuses, avide/ D'ivresse, jusqu'au soir je regarde au travers. » (vers 56/60) Ce qui compte d'avantage que le moment d'amour, c'est l'oeuvre à venir de celui-ci. Comme le buveur de vin boit pour s’enivrer, le plaisir dure longtemps après la dernière goutte bue. Nous imaginons donc le plaisir de Mallarmé pour celui-ci que de voir son œuvre se « perpétrer » dans d'autres œuvres que la sienne, et ainsi que le Faune ne sait se contenter d'une seule muse, souhaitant trop d'hymen, cherche encore le la dans toutes les clartés des souvenirs regonflés.

L’après-midi d’un faune. Un enseignement en filigrane derrière les mots.

Le poème de Mallarmé instaure un dialogue entre les arts qui est représentatif de son rapport au monde : plus qu’un poète, il est le grand intermédiaire des artistes de son époque et permet, ainsi qu’un accoucheur, de donner aux musiciens, aux peintres, aux sculpteurs et aux autres poètes un point de départ dans un nouvelle conception du langage. En effet, Mallarmé invente son propre langage, opaque, qui ne cherche nulle illustration, mais refuse cependant l’indicible. Tout langage signifie quelque chose, cependant Mallarmé ne part pas de la conception classique et lyrique de la poésie traditionnelle. Son idée est d’arriver l’esprit vide devant l’œuvre et d’augmenter l’inentendu. Par là même, l’ingénuité s’allie au génie. Dans son poème L’Après-midi d’un faune, Mallarmé se détache de l’histoire linéaire de la nymphe Syrinx et fait basculer le corps de la muse dans de l’érotisme et du musical, de la fiction simple à un théâtre mental marqué par les sens. C’est pour cette raison que des artistes tels que Debussy et Manet s’intéresseront à ce poème, en lui donnant un destin particulier. Il ne s’agit pas, encore une fois, d’illustrer, et Debussy, ainsi que Manet, transcendent l’œuvre en en créant une deuxième, puis une troisième, indépendante et pourtant inspirée.
Mallarmé semble créer un lien presque mystique avec ceux qui l’entourent. L’admiration et la confiance réciproques permettent aux artistes de se laisser aller à leur propre univers, allant bien au-delà de l’explication de texte, de la citation ou de la paraphrase, donnant à cette ronde des arts une portée si grande qu’elle devient l’origine de création d’œuvres dans un cercle vertueux qui laisse la place à une infinie imagination.

« L'itinéraire spirituel de Mallarmé est celui qui montre le mieux, avec celui de Baudelaire et de Rimbaud, combien l'aventure de l'écriture est tout d'ordre métaphysique. C'est la « grande aventure intérieure » au cours de laquelle Mallarmé a « rencontré deux abîmes qui (le) désespèrent. L'un est le Néant, L'autre vide est celui de (sa) poitrine. » (lettre à Cazalis)
Dans ses premiers poèmes, où l'influence baudelairienne est sensible, on retrouve la « double postulation » qui l'obsède, lui aussi : la soif de l'idéal et la hantise de la mort ou plutôt de l'impuissance créatrice. Retenant la leçon de Baudelaire et du Parnasse, selon laquelle tout poète porte en lui un critique, Mallarmé va la pousser jusqu'à ses conséquences extrêmes, d'où un lyrisme toujours contrôlé, puis refusé, la recherche de l'impersonnalité, de « l'oeuvre pure » impliquant « la disparition élocutoire du poète qui cède l'initiative aux mots » (Crise de vers) » (Le XIXe siècle en littérature, collection perspectives et confrontations, Hachette)

« Conscient de l'inaccessibilité de l'idéal, « redescendu de l'absolu », Mallarmé a cherché ses sources vives ailleurs, dans une poésie laborieuse, explorant les possibilités du langage tant sur le plan syntaxique que phonématique. Il ne s'agit pas seulement d'une technique linguistique, mais d'une quête métaphysique, d'une ascèse au terme de laquelle seule la littérature justifie la vie.
Regrettant que le poète ne dispose que d'un instrument grossier – que la langue, véhicule utilitaire – et non d'une « langue immaculée » où le mot serait imitation de la chose, Mallarmé va poursuivre cette transmutation du langage déjà entreprise par Baudelaire et Rimbaud.
Le signe linguistique étant arbitraire, par un éclatement de la syntaxe qui permet un jeu de reflets entre les mots en particulier à la rime, par un recours à la métaphore qui, en associant deux termes en fait naître un troisième sur le mode allusif, Mallarmé a tenté d'abolir le hasard qui a créé des mots phonétiquement faux. »