lundi 15 juillet 2013

Ecriture Créative avec madame Ali Ben Ali - Exercice sur l'Ellipse

Exercice sur l’Ellipse 
à partir d'un récit minimal en trois temps, l'auteur doit raconter une histoire, en faisant l'élision de l'un de ces trois temps. Le récit ci-dessous « Mais que fait la police ? » par Mitia Pierretti fait l'ellipse du milieu de l'histoire. Nous pouvons donc suivre le début et la fin de l'histoire, tout en recoupant par l'imaginaire et les éléments du récit le milieu.

Récit minimal :

  1. Paul est accusé par une voisine d’avoir jeté un cendrier dans la cour.
  2. La police enquêtant, arrête un sans papier dans l’immeuble.
  3. Paul qui se souvient d’avoir fait tomber le cendrier, est invité à dîner chez sa voisine.

Mais que fait la police ?
Par Mitia Pierretti
1.
Comme tous les matins, Paul ouvre la fenêtre de sa chambre jaune et arrose son jasmin. Dans la cour une blonde le regarde fixement : « Vous avez vu ? »  balbutie-t-elle. « Non, je n’ai pas encore mis mes lunettes. » lui répond Paul d’un ton pressé. Il a un rendez-vous à 10 h avec Mme Lacombe au Greta, rue Orfila. 9h30 et 10 secondes prévient le journaliste poli d’Europe 1. La voisine semble bien jolie dans sa chemise de nuit légère, mais il n’a vraiment pas le temps de sauver une blonde, si jolie soit-elle. Intrigué pourtant, il s’approche de la fenêtre. Elle est toujours là, appareil photo en main, mitraillant la cour. Elle lui lance : « Je vous ai vu ! …Vous avez mis vos lunettes ? »
Paul, aussi troublé qu’agacé, prend brusquement ses lunettes sur sa table de nuit tapissée de post-it. Dans la cour la svelte voisine court-vêtue scrute encore son balcon et cette fois, avec méchanceté, semble-t-il s’apercevoir.
- Et bien quoi ? Je vois un cendrier brisé ? 
- Oui…je sais d’où il vient…Je vous ai vu ! 
Paul réfléchit. Il n’a pourtant pas entendu de bruit ce matin. Ah cette nuit…peut être avait-il laissé le cendrier sur le rebord de sa fenêtre après sa dernière clope ? De toute manière, il est pressé et ne sait qu’offrir un rire gêné à cette situation. Excédée par cette offense, la femme brandit son portable, menace Paul d’un regard anthracite et compose le 17.
3.
La nuit déjà se faufile rue Jean Pierre Timbaud quand Paul rentre du boulot. Sur son paillasson l’attend digne et opaline, une bouteille de Vodka Zubroska. Un petit mot d’une écriture arrondie l’informe : « Pardon pour le désagrément ce matin. Une carbonade vous attend pour accompagner ce modeste cadeau. Tatiana, votre voisine. » Ca valait le coup d’arriver en retard à cette fichue formation, pense Paul en se ruant chez lui. Un coup d’œil dans la glace. Beau gosse… Il descend les escaliers trois à trois, frappe. Elle lui ouvre, avenante et un peu plus habillée que ce matin.
- Bonsoir, je vous attendais. Entrez. 
- Bonsoir. Quelle surprise, merci ! 
Ils s’assoient côte à côte sur le sofa vert du salon, grignotent de savoureux amuse-gueules au caviar de chez Petroussian. « Je peux fumer ? » demande Paul. Il allume un cigarillo.  
- Ah, dit Tatiana, vous fumez aussi des cigarillos ? Comme le jeune Sri Lankais sans papier qu’on a arrêté ce matin ! 
- Quel jeune ? 
- Vous savez, le voisin du 6ème. Certes les policiers l’ont disculpé de l’affaire du cendrier brisé, parce que de si haut il aurait était éclaté en plus petits morceaux. Mais ils l’ont tout de même amené au poste pour contrôle d’identité, et après vérification, ils ont décidé qu’il serait reconduit à la frontière. 
- Quoi ? Reconduit ? 
Paul est assailli soudain par une image : son cendrier hier soir, tard, laissé sur le rebord de la fenêtre…la pluie…le vent… « Mais pourquoi reconduit ? » - Oh, dit Tatiana, trinquons sans nous soucier plus de cette sordide histoire.
Paul sans porter le verre à ses lèvres, sent son crâne tambouriner. Pris de remords, il sort de chez Tatiana, claque la porte, se barricade, ferme la porte de sa chambre, respire mal car en son for intérieur palpite un cœur étranger.


samedi 13 juillet 2013

À venir : Une grande saga audio

Il s'agit de raconter les aventures fictives d'un groupe d'étudiants lors de la construction de Paris 8 – d'abord centre universitaire expérimental de Vincennes en 1968 – et son déplacement à Saint Denis en 1969.

L'occasion pour nous de remonter dans le temps et de croiser les penseurs à l'origine de notre université (Gilles Deleuze, Michel Foucault, Hélène Cixous, etc.), de comprendre les idéaux de l'époque, la différence avec aujourd'hui, et de proposer à notre tour une vision de l'enseignement.

En attendant, voici un lien pour visionner un documentaire sur cette période passionnante :


mercredi 10 juillet 2013

Exercice pour un cours d'écriture créative avec madame Zineb Ali Ben Ali

Le Logo-Rallye

La consigne de cet exercice était d'écrire durant le cours tout en prenant compte des mots lancés par la professeure toutes les cinq à dix minutes. Il fallait donc être créatif et rapide à la fois.
Les mots sont ici mis en gras dans le texte ci-dessous.

Pourquoi logo-rallye ? 
En grec, logos signifie "parole, discours". Il sert à désigner, en suffixe par exemple, un certain nombre de disciplines du savoir, comme la sociologie, l'archéologie. 
Une forte envie de parler, un flux de paroles rapides peut aussi s'appeler une loghorrhée.
Un rallye peut-être une compétition où les concurrents atteignent un but en passant par un certain nombre d'étapes.
Le titre de l'exercice éclaire donc sa consigne.

Le "logo-rallye" par Mitia Pierretti, élève en licence 3 de Lettres :

Ce jour là, à la bibliothèque de l’université St Denis, la lumière inondait les vitres et caressait les pages d’étudiants zélés. Malgré cela, Antoine avait placé son livre d’Immunologie de la sémiotique à 37 km exactement de la porte de son garage. Avec sa nouvelle montre, il s’amusait à tout mesurer : poids, taille, temps…Une 50kg, 300g, 1 m65 cm s’était assise à 37 cm de sa chaise en 16 secondes. Elle s’approchait maintenant, rapprochait sa chaise en colère, ou plutôt par colère. Troublé par le regard duveteux de cette fille, il ne savait plus rien à part qu’il n’aimait pas qu’on enfreigne inopinément la circonférence de 21 cm de son espace corporel vital, et cela pour quelque motif que ce soit, même par colère ! Pris en étau, coincé par cet obturateur émotionnel commotionnant, obturateur manié par cette fille bien décidée à lui gâcher sa journée en le déracinant de cet espace de concentration et de silence où il aimait à étudier, son souffle se trouait et son estomac haletait. Elle avançait à présent, avec brusquerie, sa main sur son classeur jaune de cours de linguistique épidémique. Quelle audace ! Diable ! « Que me veut cette fille » pensa-t-il, quand elle avança plus encore sa main sur son pull vert pomme. Paume contre pomme, cloque sur sa seconde peau de laine. « Mais que faites-vous ? » dit-il d’une voix qu’il eut voulu comme une claque mais qui ne tinta que comme un ruissellement de lumière infuse dans cet espace de science. Point de réponse et cette main pendait maintenant, prolongeant le bras qui était ostensiblement posé sur son épaule ! Le visage de la Femme abordait ses joues ; il sentait sur sa barbe naissante, cette herbe mauvaise des jours où par un grand malheur il arrivait en retard, une respiration fraîche et mentholée. "Eloignez-vous" dit-il, regardant désespéré à l’entour si on l’épiait. Devait-il crier ? Se défendrait-il, seul ? Que lui voulait cet être concomitant dont les lèvres, telle une maudite apparition, à minuit, un soir de pluie, à la porte d’un château délabré, accostaient son lobe d’oreille gauche ? Il entendit : « J’ai envie de toi, tout de suite, ici ». « Ca suffit. Lâchez-moi ». Il ne parvenait à parler plus fort. Bruissement sourd à travers les tables de groupes d’étudiants tatoués et percés. "Lâchez-moi » dit-il, somnambule alors que la main prédatrice glissait le long de son torse glabre, s’enfonçait en quête du robinet capable d’étancher la soif de ses élans. En nage, submergé, il cria des bulles de vapeur insonore.