lundi 7 octobre 2013

Oxmo Puccino - Le Cactus de Sibérie


"J'ai longtemps pensé que nous vivions
dans un asile à ciel ouvert 
Avec du recul
j'ai découvert
qu'on est tous de la même planète ,
mais pas du même monde 
Votre dimension n'est pas nette,
la mienne est profonde 
En
plongée constante ,
vu qu'à la surface l'apparence trompe, 
On sait plus qui est qui est
vivant"
Arrivés sur Terre, 2004

« Mes mots s'emboîtent les gens s'y voient comme
Dans une flaque d'eau, ça leur renvoie un triste reflet
Mais est-ce ma faute ?
T'es l'enfant seul c'est pas facile, on se comprend
Peu l' savent
Que je le sache ça te surprend.
Il mate par la vitre la solitude qui le mine
Fait passer la quinine pour un sucre
Faut être lucide, il faut qu'on se libère, disent-ils
Ils n'en discutent pas, confondent la rime et l'acte
La fuite et le suicide, un pact', une promo sans tract
Pas trop de mots nobody n'a capté le sale souhait
L'envie de se laisser par le cou pendu,
Pour punir les parents qui, pour aimer l'enfant,
Ont trop attendu, car si l'amour est une course
L'enfant naît c'est le départ en tête, l'embêtement
En passe-temps en fait des parents bêtes !
Maîtrise lancinante, sentiments en ciment sinon
Dans six ans on me retrouve ciseaux dans le crâne
Dans le sang gisant »
L'Enfant seul, 1999




samedi 28 septembre 2013

Raconte moi ton histoire, de Tisha Ivana, L1

Raconte-moi ton histoire

Dans la douceur de l’hiver
Sous un ciel éclairé
À l’abri des regards
Je raconte mon histoire.

Pour les petits et les grands
Les heureux et les malheureux
Les sourds et les muets
Je raconte mon histoire.

Le matin comme le soir
De jour comme de nuit
Qu’il pleuve ou qu’il vente
Je raconte mon histoire.

Aux âmes tristes et aux hommes qui rient
À ceux qui gardent leurs secrets enfouis
Pour tous ceux dont le sourire exprime une grande peine
Je raconte mon histoire.

Sur des pages blanches noircies au stylo
Sur un tableau noir au milieu de la classe
Sur un ordinateur avec l’option « Word »
Je raconte mon histoire.

Sous la forme d’une livre ou d’un film
D’une poésie ou d’une pièce de théâtre
Comme une comédie ou une tragédie
Je raconte mon histoire.

Pour expier mes regrets
Pour dédramatiser la vie
Pour redonner de l’espoir
Je raconte mon histoire.

Pour aujourd’hui et pour demain
Pour le futur et la postérité
Pour que jamais on ne parle de moi comme un souvenir
Je raconte mon histoire.

À travers des mots silencieux
Par le biais de silences assourdissants
Ou d’un cri à causer une extinction de voix
Je raconte mon histoire.

Pour faire jouer les rimes et les mots
Pour taire les soupirs et les maux
Pour plaire aux habitants de Meaux
Je raconte mon histoire.

Dans l'obscurité, la nuit
Submergée par vos peurs
J'effacerai vos frayeurs
En racontant une histoire
Une vie

Tisha Ivana, élève en L1 de Lettres

mercredi 25 septembre 2013

La Douleur, de M. Duras : le doute du lecteur

Je lis la La Douleur de Marguerite Duras, pour un cours de Master (Atelier de création Littéraire avec Olivia Rosenthal). Je m'arrête au tout début de ma lecture, le récit est intriguant : est-ce totalement fictionnel ou un journal autobiographique écrit durant la guerre ? Il faudrait connaître M. Duras pour répondre à cette question, sa biographie, son œuvre. Je n'ai lu que Le Ravissement de Lol V. Stein où l'auteure s'insère avec aisance dans la peau du narrateur – dont on ne connaît les détails qu'après une lecture avancée – et y mêle point de vue externe et interne sans distinction, avec légèreté. J'avais alors l'impression de suivre un fil mystérieux. Dans le cas de La Douleur, c'est encore différent : la présente édition (Gallimard, Folio, 2012) n'a qu'une préface, qui n'en est peut-être pas une, de M. Duras. Si elle fait partie de l'oeuvre, celle-ci est fictionnelle. Mais elle peut aussi tout à fait ne pas l'être.
La voici :

« J'ai retrouvé ce Journal dans deux cahiers des armoires bleues de Neauphle-le-Château.
Je n'ai aucun souvenir de l'avoir écrit.
Je sais que je l'ai fait, que c'est moi qui l'ai écrit, je reconnais mon écriture et le détail de ce que je raconte, je revois l'endroit, la gare d'Orsay, les trajets, mais je ne me vois pas écrivant ce Journal. Quand l'aurais-je écrit, en quelle année, à quelles heures du jour, dans quelle maison ? Je ne sais plus rien.
Ce qui est sûr, évident, c'est que ce texte-là, il ne me semble pas pensable de l'avoir écrit pendant l'attente de Robert L.
Comment ai-je pu écrire cette chose que je ne sais pas encore nommer et qui m'épouvante quand je la relis. Comment ai-je pu de même abandonner ce texte pendant des années dans cette maison de campagne régulièrement inondée en hiver.
La première fois que je m'en soucie, c'est à partir d'une demande que me fait la revue Sorcières d'un texte de jeunesse.
La douleur est une des choses les plus importantes de ma vie. Le mot « écrit » ne conviendrait pas. Je me suis trouvée devant des pages régulièrement pleines d'une petite écriture extraordinairement régulière et calme. Je me suis trouvée devant un désordre phénoménal de la pensée et du sentiment auquel je n'ai pas osé toucher et au regard de quoi la littérature m'a fait honte. »

Je crois que je me prends au jeu. Je préfère être naïve, ne pas faire de recherche pour en savoir plus. Et cela pour une raison précise : la narratrice ne sait pas elle-même, tout en sachant. Comme elle, je sais que Robert L. est mort tout en ne le sachant pas et j'attends sans savoir si j'en saurais davantage.

lundi 16 septembre 2013

Karen Blixen - La Ferme africaine

Karen Blixen, 1885 - 1962



Extraits d'une petite biographie sur Karen Blixen, édition Gallimard dans la collection Folio :

« Karen Blixen trône au panthéon de la littérature danoise, aux côté de H.C. Andersen. Dans sa préface aux Sept contes gothiques, Marcel Schneider la décrit à la fin de sa vie comme une « reine fantôme » , « mince et tranchante comme une épée, les yeux charbons, indomptable. » Elle règne en souveraine adulée sur une cour de jeunes écrivains et intellectuels danois. Elle a tout perdu, sa ferme en Afrique, son mari dont elle a divorcé, son amant mort dans un accident d'avion, sa santé (elle souffre de la syphilis). « Quand je fus atteinte, et comme il n'y avait aucun secours à chercher auprès de Dieu, dit-elle au poète Thorkild Bjornvig avec qui elle entretint une relation passionnée, je promis mon âme au diable et il s'engagea en retour à ce que tout ce que je vivrais dès lors se transformât en récit. » Si Karen Blixen a cher payé sa gloire, le diable ne s'est pas montré avare. La dame de lettres a su faire de sa vie une œuvre d'art, transmuant ses souffrances en récit pleins de sagesse. »

Extrait de La Ferme africaine (1942), traduction du danois par Alain Gnaedig en 2005 :


« Il est impossible que la proximité d'une ville n'influe pas sur l'existence que l'on mène. Peu importe que l'on aime ou non cette ville, elle attire à elle les idées et les pensées en vertu d'une loi de la gravitation intellectuelle. Le halo lumineux qui planait sur le ciel de Nairobi, la nuit, et que je distinguais des chemins de la ferme, me faisait toujours revenir à l'esprit des images et des souvenirs des grandes villes d'Europe. »

samedi 24 août 2013

Le Doute - Virginia Woolf, Journal d'un écrivain

Une grande écrivaine de la première moitié du vingtième siècle.

La citation suivante provient du journal de Virginia Woolf que son mari et ami Léonard Woolf, a fait publier après son suicide en 1941. Il écrit ceci : « J'ai lu attentivement les vingt-six volumes du Journal de Virginia Woolf et j'en ai extrait, pour ce volume, tout ce qui relève de son travail d'écrivain. » (4ème de couverture de la présente édition 10/18, octobre 2000).

L'extrait choisi se situe le vendredi 8 avril 1921 à "onze heures moins dix". Virginia Woolf écrit pour elle-même, pour « exercer les muscles de (sa) main ». Elle est claire et simple, elle écrit comme elle pense, au fil des idées.
Ce Journal est précieux pour approfondir et connaître les choix, les divagations, les jugements littéraires, les rencontres, les étapes de la construction des romans de Virginia Woolf.


« Je devrais être en train d'écrire La Chambre de Jacob, et je n'y arrive pas. Et comme ce journal est une vieille confidente pleine de bienveillance et au visage neutre, je vais essayer de définir la raison pour laquelle je n'y arrive pas. La vérité, voyez-vous, c'est qu'en fait d'écrivain, je suis une ratée. Je suis démodée, vieille, incapable d'aucun progrès, obtuse. Le printemps est partout, et mon livre est sorti (prématurément) et tué dans l'oeuf. Un pétard mouillé. La vérité, pour en venir au fait matériel et tangible, c'est que Ralph a envoyé au Times pour la critique sans préciser la date de publication. Résultat, ils ont bâclé une courte notice « pour lundi soir au plus tard » qu'on a glissé dans un recoin obscur, notice plutôt succincte, suffisamment élogieuse mais parfaitement inintelligente. Je veux dire qu'ils ne voient pas que je suis en quête de quelque chose d'intéressant. C'est cela qui me fait supposer que je ne le suis pas. Voilà pourquoi je n'arrive pas à continuer Jacob. Oh, et puis le livre de Lytton est sorti, et on lui consacre trois colonnes. D'éloges je suppose. Je ne prends pas la peine de mettre tout cela en ordre, ni de dire comment le découragement m'a gagnée, si bien que pendant une demi-heure j'ai été plus déprimée que jamais. C'est-à-dire que j'étais décidée à ne plus jamais écrire, sauf des critiques. Et voilà que pour retourner le fer dans la plaie il y eut une joyeuse réunion au 41 pour fêter Lytton, ce qui était tout à fait naturel, mais pas une seule fois on n'a fait allusion à mon livre, qu'il devait pourtant avoir lu. Et, pour la première fois, je ne peux pas compter sur son approbation. Si seulement j'avais été qualifiée de « mystère » ou d' « énigme » par le Times Literary Supplement, cela me serait égal, car ce genre de choses ne serait pas pour plaire à Lytton, à moins que je ne sois une quantité négligeable.
Oui, il faut tout de même regarder en face cette question des éloges et de la renommée. (J'oublie de dire que Doran a refusé mon livre pour l'Amérique). Qu'apporte la popularité ? J'ajoute (après avoir été interrompue par Lottie qui m'a apporté mon lait, et maintenant que le soleil a cessé de s'éclipser) que j'ai clairement conscience d'écrire pas mal d'absurdités. Ce qu'il faut, Roger l'a dit très justement hier, c'est rester actuel ; que les gens s'intéressent à vous et vous suivent dans votre travail. Ce qui me déprime, c'est l'idée d'avoir cessé d’intéresser les gens au moment même où, soutenue par la presse, je croyais m'affirmer davantage. Ce n'est pas que je souhaite avoir une réputation bien établie, comme celle à laquelle je commençais à atteindre, je crois : celle d'être l'une de nos meilleures romancières. Il faut encore, naturellement, que je rassemble toutes les critiques particulières, et c'est cela qui constitue la véritable épreuve. Quand j'aurais bien pesé cela, je serai en mesure de dire si je suis « intéressante » ou démodée. En tout cas je me sens suffisamment vivante pour m'arrêter si je parais démodée. Je ne veux pas devenir une machine, ou alors une machine à moudre des articles. Et tandis que j'écris, je sens monter quelque part dans ma tête cette étrange et très agréable impression que j'ai envie d'écrire, d'exprimer mon propre point de vue. Je me demande toutefois si mon sentiment d'écrire pour une demi-douzaine de personnes au lieu de quinze cents pervertira cette impression – me rendra excentrique. Non, je ne crois pas. Mais, comme je l'ai dit, je dois regarder en face cette méprisable vanité qui est à l'origine de tout ce tatillonnage, de tous ces barguignages. Je crois que le seul remède pour moi est d'avoir mille autres sujets d'intérêts, et si l'un se trouve lésé, de laisser aussitôt mon énergie se déverser sur le russe, le grec, ou les journaux, ou mon jardin, ou les gens, ou n'importe quelle activité étrangère à mes romans. »


PAROLES D'ECRIVAIN(E)S

PAROLES D'ECRIVAIN(E)S

Chaque semaine, une citation d'auteur sur le thème du mois.

Par exemple, en ce mois d'août 2013, nous commencerons sur le thème du doute, avec Virginia Woolf.

Si vous avez des idées, vous êtes les bienvenus, faites-nous découvrir vos auteurs préférés, les passages littéraires qui vous ont marqué et Envoyez-les à bloglettresp8@gmail.comc'est très facile et rapide !



Merci de votre visite !

Heinquoicomment

Heinquoicomment

J’me lève c’matin sans sonnerie
Quoi déjà 6 heures et demie
C’foutu réveil a clamsé c’te nuit
Et v’la qu’faut j’cours pour gagner ma vie

Hein quoi comment

A peine sortie de mon nid
J’sens des gouttes de pluie
Partir en vélo c’est les pti’oizeaux cuits
M’vla ready pour une buspartie

Heinquoicomment

Y'a une grève qu’m’dit ma voisine d’piquet
En mangeant un qu’a pas l’air frais d'beignet
Plus d’une demi heure et l’bus s’radine complet
C’est parti pour qu’la porte j’me prenne à chaq’arrêt

Hein quoi comment

Ambiance électrique ma vahiné de chef note
Sans un bonjour. mon humeur cahote
Brief en sandwich jusqu’à c qu’un collègue calotte
Une fille qu’il prend pour une pas prop’lotte

Hein quoi comment

C’est Noël faste frasques convivialité
J’m’incruste dans l’équipe d’ma sexywomen attablée
« Pour 2007 l’espagnol j’vais m’mettre à parler »
Parce que son copain chilien il est
Komment hein Koi
Je le hais

Heinquoicomment

Encore 4 heures et quart
A taper sur des écrans noirs
« Allez il nous manque un accord mes canards »
Et ça taille rit baille parle sport et poire

Heinquoicomment

Le faon aux yeux étoilés qu’jcroyais
complice par une orientation sexuelle partagée
« j’prends ton numéro mon match tu viendras regarder»
Et là j’m’dit q’mon gaydar en panne est tombé

Heinquoicomment

Sept heure la mine ravie c'est la sortie
Va aux courses convoite l’bus DESIDERATA
Alors que « H et M ne désemplit pas »
Arrivée au nid c'est 9 heures et demie

Heinquoicomment

Tonneau de Danaïdes poches percées
C’est la vaporisation des secondes
Et toute ébahie de ce temps baillé
J’m’ensommeille sur un sommier de frondes

Mitia Pierreti



lundi 15 juillet 2013

Ecriture Créative avec madame Ali Ben Ali - Exercice sur l'Ellipse

Exercice sur l’Ellipse 
à partir d'un récit minimal en trois temps, l'auteur doit raconter une histoire, en faisant l'élision de l'un de ces trois temps. Le récit ci-dessous « Mais que fait la police ? » par Mitia Pierretti fait l'ellipse du milieu de l'histoire. Nous pouvons donc suivre le début et la fin de l'histoire, tout en recoupant par l'imaginaire et les éléments du récit le milieu.

Récit minimal :

  1. Paul est accusé par une voisine d’avoir jeté un cendrier dans la cour.
  2. La police enquêtant, arrête un sans papier dans l’immeuble.
  3. Paul qui se souvient d’avoir fait tomber le cendrier, est invité à dîner chez sa voisine.

Mais que fait la police ?
Par Mitia Pierretti
1.
Comme tous les matins, Paul ouvre la fenêtre de sa chambre jaune et arrose son jasmin. Dans la cour une blonde le regarde fixement : « Vous avez vu ? »  balbutie-t-elle. « Non, je n’ai pas encore mis mes lunettes. » lui répond Paul d’un ton pressé. Il a un rendez-vous à 10 h avec Mme Lacombe au Greta, rue Orfila. 9h30 et 10 secondes prévient le journaliste poli d’Europe 1. La voisine semble bien jolie dans sa chemise de nuit légère, mais il n’a vraiment pas le temps de sauver une blonde, si jolie soit-elle. Intrigué pourtant, il s’approche de la fenêtre. Elle est toujours là, appareil photo en main, mitraillant la cour. Elle lui lance : « Je vous ai vu ! …Vous avez mis vos lunettes ? »
Paul, aussi troublé qu’agacé, prend brusquement ses lunettes sur sa table de nuit tapissée de post-it. Dans la cour la svelte voisine court-vêtue scrute encore son balcon et cette fois, avec méchanceté, semble-t-il s’apercevoir.
- Et bien quoi ? Je vois un cendrier brisé ? 
- Oui…je sais d’où il vient…Je vous ai vu ! 
Paul réfléchit. Il n’a pourtant pas entendu de bruit ce matin. Ah cette nuit…peut être avait-il laissé le cendrier sur le rebord de sa fenêtre après sa dernière clope ? De toute manière, il est pressé et ne sait qu’offrir un rire gêné à cette situation. Excédée par cette offense, la femme brandit son portable, menace Paul d’un regard anthracite et compose le 17.
3.
La nuit déjà se faufile rue Jean Pierre Timbaud quand Paul rentre du boulot. Sur son paillasson l’attend digne et opaline, une bouteille de Vodka Zubroska. Un petit mot d’une écriture arrondie l’informe : « Pardon pour le désagrément ce matin. Une carbonade vous attend pour accompagner ce modeste cadeau. Tatiana, votre voisine. » Ca valait le coup d’arriver en retard à cette fichue formation, pense Paul en se ruant chez lui. Un coup d’œil dans la glace. Beau gosse… Il descend les escaliers trois à trois, frappe. Elle lui ouvre, avenante et un peu plus habillée que ce matin.
- Bonsoir, je vous attendais. Entrez. 
- Bonsoir. Quelle surprise, merci ! 
Ils s’assoient côte à côte sur le sofa vert du salon, grignotent de savoureux amuse-gueules au caviar de chez Petroussian. « Je peux fumer ? » demande Paul. Il allume un cigarillo.  
- Ah, dit Tatiana, vous fumez aussi des cigarillos ? Comme le jeune Sri Lankais sans papier qu’on a arrêté ce matin ! 
- Quel jeune ? 
- Vous savez, le voisin du 6ème. Certes les policiers l’ont disculpé de l’affaire du cendrier brisé, parce que de si haut il aurait était éclaté en plus petits morceaux. Mais ils l’ont tout de même amené au poste pour contrôle d’identité, et après vérification, ils ont décidé qu’il serait reconduit à la frontière. 
- Quoi ? Reconduit ? 
Paul est assailli soudain par une image : son cendrier hier soir, tard, laissé sur le rebord de la fenêtre…la pluie…le vent… « Mais pourquoi reconduit ? » - Oh, dit Tatiana, trinquons sans nous soucier plus de cette sordide histoire.
Paul sans porter le verre à ses lèvres, sent son crâne tambouriner. Pris de remords, il sort de chez Tatiana, claque la porte, se barricade, ferme la porte de sa chambre, respire mal car en son for intérieur palpite un cœur étranger.


samedi 13 juillet 2013

À venir : Une grande saga audio

Il s'agit de raconter les aventures fictives d'un groupe d'étudiants lors de la construction de Paris 8 – d'abord centre universitaire expérimental de Vincennes en 1968 – et son déplacement à Saint Denis en 1969.

L'occasion pour nous de remonter dans le temps et de croiser les penseurs à l'origine de notre université (Gilles Deleuze, Michel Foucault, Hélène Cixous, etc.), de comprendre les idéaux de l'époque, la différence avec aujourd'hui, et de proposer à notre tour une vision de l'enseignement.

En attendant, voici un lien pour visionner un documentaire sur cette période passionnante :


mercredi 10 juillet 2013

Exercice pour un cours d'écriture créative avec madame Zineb Ali Ben Ali

Le Logo-Rallye

La consigne de cet exercice était d'écrire durant le cours tout en prenant compte des mots lancés par la professeure toutes les cinq à dix minutes. Il fallait donc être créatif et rapide à la fois.
Les mots sont ici mis en gras dans le texte ci-dessous.

Pourquoi logo-rallye ? 
En grec, logos signifie "parole, discours". Il sert à désigner, en suffixe par exemple, un certain nombre de disciplines du savoir, comme la sociologie, l'archéologie. 
Une forte envie de parler, un flux de paroles rapides peut aussi s'appeler une loghorrhée.
Un rallye peut-être une compétition où les concurrents atteignent un but en passant par un certain nombre d'étapes.
Le titre de l'exercice éclaire donc sa consigne.

Le "logo-rallye" par Mitia Pierretti, élève en licence 3 de Lettres :

Ce jour là, à la bibliothèque de l’université St Denis, la lumière inondait les vitres et caressait les pages d’étudiants zélés. Malgré cela, Antoine avait placé son livre d’Immunologie de la sémiotique à 37 km exactement de la porte de son garage. Avec sa nouvelle montre, il s’amusait à tout mesurer : poids, taille, temps…Une 50kg, 300g, 1 m65 cm s’était assise à 37 cm de sa chaise en 16 secondes. Elle s’approchait maintenant, rapprochait sa chaise en colère, ou plutôt par colère. Troublé par le regard duveteux de cette fille, il ne savait plus rien à part qu’il n’aimait pas qu’on enfreigne inopinément la circonférence de 21 cm de son espace corporel vital, et cela pour quelque motif que ce soit, même par colère ! Pris en étau, coincé par cet obturateur émotionnel commotionnant, obturateur manié par cette fille bien décidée à lui gâcher sa journée en le déracinant de cet espace de concentration et de silence où il aimait à étudier, son souffle se trouait et son estomac haletait. Elle avançait à présent, avec brusquerie, sa main sur son classeur jaune de cours de linguistique épidémique. Quelle audace ! Diable ! « Que me veut cette fille » pensa-t-il, quand elle avança plus encore sa main sur son pull vert pomme. Paume contre pomme, cloque sur sa seconde peau de laine. « Mais que faites-vous ? » dit-il d’une voix qu’il eut voulu comme une claque mais qui ne tinta que comme un ruissellement de lumière infuse dans cet espace de science. Point de réponse et cette main pendait maintenant, prolongeant le bras qui était ostensiblement posé sur son épaule ! Le visage de la Femme abordait ses joues ; il sentait sur sa barbe naissante, cette herbe mauvaise des jours où par un grand malheur il arrivait en retard, une respiration fraîche et mentholée. "Eloignez-vous" dit-il, regardant désespéré à l’entour si on l’épiait. Devait-il crier ? Se défendrait-il, seul ? Que lui voulait cet être concomitant dont les lèvres, telle une maudite apparition, à minuit, un soir de pluie, à la porte d’un château délabré, accostaient son lobe d’oreille gauche ? Il entendit : « J’ai envie de toi, tout de suite, ici ». « Ca suffit. Lâchez-moi ». Il ne parvenait à parler plus fort. Bruissement sourd à travers les tables de groupes d’étudiants tatoués et percés. "Lâchez-moi » dit-il, somnambule alors que la main prédatrice glissait le long de son torse glabre, s’enfonçait en quête du robinet capable d’étancher la soif de ses élans. En nage, submergé, il cria des bulles de vapeur insonore.